3ème mission : Vol Organisé

Kafei : *Parfait, merci de me laisser me débrouiller avec elle... Je peux même pas faire semblant de dormir pour éviter.*

Plein de phrases passèrent dans la tête de Kafei sans qu'aucune ne lui paraisse bonne pour entamer une discussion. Alors il choisit celle qui lui semblait la moins pire.

Kafei : Beau temps hein ? Votre sort a très bien marché en tout cas, je ne sens plus la douleur ! Dites à tout hasard, vous n'auriez pas un miroir assez grand ?

Cléo : Oh, il a fait tant d'effet que ça ? Vous semblez pourtant en pire état que quand je vous ai quitté... Je me demande comment celà se fait-il...

Elle prit une mine de petite fille innocente, fit semblant de réfléchir, puis s'avança vers le lit et posa sa main sur la gorge de Kafei.

Cléo : Je vais vour le redire une fois. Une seule et unique fois. Vous bougez, ce n'est pas votre blessure qui vous tuera, mais moi.

On disait plus tôt que Kaléidoscope avait la même expression que Cléo. Là, Cléo avait exactement le même regard que la musicienne apprentie. Ses yeux venaient de prendre une teinte rosée. Les rubans de son arme vibraient de façon étrange.

Cléo : Je vous interdit de bouger, de vous retourner, de remuer un seul orteil, ou quoi que ce soit ! D'abord, vous vous retrouvez blessé ! Après, tout le palais se met en quatre pour vous sauver, et votre fille vient vous voir tout les jours, pour qu'à la fin, il vous demande de réaliser cette promesse stupide !!!

Cléo Fae était en colère. Son souffle était saccadé, et elle battait des cils, pour chasser de lointains souvenirs. Elle avait voulu oublier. Elle avait même commit l'irréparable pour ça. Pourtant, rien ne faisait partir cette douleur intense qui survenait quand elle pensait à ses parents.
Les serviteurs avaient pu remarquer un phénomène étrange. La nuit, Cléo Fae était différente. Un peu plus "comme avant", disaient certains. Elle était toujours aussi égoiste, elle avait ce regard hautain que personne ne pouait supporter, elle parlait à tous comme s'ils n'étaient rien... Mais pourtant, quand elle regardait Suhaj, c'était avec un autre oeil que dans la journée. Elle lui disait "tient bon !", au lieu de "rend-toi".
On aurait put penser qu'elle était un peu folle. Elle se mit à fredonner une berceuse, en pleurant en silence, pour se calmer. Elle souhaitait retrouver son état "normal". Quand elle ne ressentait rien. Quand elle ne sentait pas ce manque immense, en elle. Un manque qui n'était pas du qu'à la mort de ses parents...

Kafei était terrorisé et ne comprenait rien à ce qu'il s'était passé, et tant qu'il était encore en vie c'est ce qui importait.

Kafei : Je... ne peux pas avoir de fille, je n'ai que...

Il commença à calculer dans sa tête, le système des années chez les Anges et chez les Humains n'est pas le même. Sachant qu'il avait dépassé les 1 000 ans au royaume des Anges, sur Pacifis il devrait avoir...

Kafei : 16 ans.

Mais il sentait qu'il ne s'agissait pas de lui après réflexion. Résurgence du passé? Il allait tenter d'en savoir plus.

Kafei : Quelqu'un d'autre était blessé ?

Cléo surveillait sa ville. Le théâtre avait prit feu, et personne ne venait aider les victimes. Elle était plongée dans le noir total. Seules les étoiles étaient source de lumière. Comment en était-elle arrivait là déjà ? On lui demandait qui avait été blessé ? Mais qui n'était pas au courant de cette histoire ?

Cléo : Le roi et la reine de Suhaj. Elle est morte sur le coup. Lui, on a essayé de le sauver, mais c'était trop tard. Il a voulu aller à la fenêtre pour voir Méhallet el-Kobra, vérifier si tout allait bien. On l'a retrouvé mort, au pied de son lit : il n'avait pas réussi à rejoindre la vitre.

Elle se tourna de nouveau vers Kafei, ses yeux ayant reprit leur couleur bleue naturelle, et pointa sa Lunarm sur lui.

Cléo : Je déteste les morts, alors si vous bougez, vous ne pouvez même pas imaginer quelle supplice je vous ferai endurer.

Les rubans s'enroulèrent autour de la plaie et Cléo s'assit sur le bord du lit, pour que le plus de tissus possible entoure la blessure, et récita la formule pour apaiser la douleur.

Kafei : Oh... vous m'en voyez navré pour mon ignorance... désolé de vous avoir fait rappelé de si mauvais souvenirs...

Il se promettait de ne plus trop bouger. Mais de chercher des informations néanmoins. Après tout, une des précautions à prendre avec un blessé c'est de le laisser immobile. Il regarda Cléo qui s'occupait de lui. Elle changeait du portrait qu'on lui a fait.

Kafei : Vous savez être terrifiante, mais aussi assez gentille...

Cléo : Vous ne savez pas ce que je suis. Je vous conseille de retirer le mot "gentille" de votre répertoire quand vous voulez me décrire...

Elle était concentrée sur le ruban, qui transmettait son pouvoir guérissant à la blessure. Elle ne l'avait jamais dit à personne. Elle avait même du mal à se l'avouer par moment : elle aurait aimé revenir en arrière. Malheureusement, c'était impossible, alors, autant aller au bout de son plan.

Cléo : Voilà.

Les bandes de tissu se relâchèrent et Cléo se leva pour chercher les bouillottes. Où ce stupide médecin les rangeait-il ?! Elle fouilla un tiroir, un second, une armoire, puis se mit sur la pointe des pieds pour passer sa main sur une étagère. Trouvée !

Cléo : Je reviens, je vais la réchauffer...

Elle quitta la pièce, qu'elle referma à clefs, et ordonna à deux femmes de chambre de préparer des draps propres, un repas de plus, et quelques autres petites choses. Ainsi, quand elle revint dans la chambre, elle était accompagnée de deux femmes qui mirent un oreiller en plus sous la tête de Kafei, sous l'oeil de Cléo qui soulignait chaque erreur et les réprimandait sans cesse. Puis, elles installèrent un second lit, plus petit, mais avec de plus jolis draps, au fond de la pièce. Quand elle sortirent, une autre fille entra, déposa deux plateaux repas appétissants sur le bureau de la pièce, salua Cléo, et suivit les précédentes dans l'aile réservée aux domestiques.

Kafei : En fait... vous faites ça parce que je suis blessé ou parce que c'est moi ?

Il essayait de comprendre la psychologie des humains, même si celle de Cléo n'est pas une qui peut être généralisée. Et puis tant qu'à parler autant que cela soit avec la Reine, comme il n'a pu interroger les servantes...

Kafei : Dans tout les cas si je peux vous rendre la pareille je le ferai. Bien que je ne sache pas trop ce que je pourrai offrir à une Reine qui a déjà tout...

Kafei commença à regarder les plats avec envie. Avec le sang perdu il sentait que des forces l'avaient quittées.

Cléo : Parce que vous êtes blessé. Un blessé, c'est inutile, or, vous avez dit que vous, au moins, vous l'étiez. Autant que ça devienne vrai, non ? Et puis, je trouve que quelqu'un qui souffre, c'est triste. On devrait toujours choisir entre le tuer, si c'est trop grave, ou faire qu'il n'est plus mal du tout. Il ne devrait pas y avoir ce milieu, où on a mal, et qu'on n'y peut rien...

Elle revoyait encore son père, les yeux clos, en train de faire des efforts pour supporter sa grave blessure après l'attaque de la ville.

Cléo : Et puis, vous avez essayé de sauver mon diamant, alors...

Oui, même si elle n'avait vraiment, vraiment rien demandé...

Cléo : Bon appétit.

Elle posa le plateau de Kafei sur les genoux de ce dernier, et partit s'installer un peu plus loin, avec son repas à elle, dans le lit installé nouvellement dans la pièce.

Kafei resta quelques instants sans bouger, en fixant son plateau repas alors qu'il était enfin à sa portée, sur ses genoux, en pleine réflexion.

Kafei : Je ne suis pas d'accord. Personne n'a le droit de mourir. Ou même de souffrir... J'ai dit que je servais à quelque chose ? C'est en fait à moitié vrai, je ne suis encore qu'apprenti médecin... mais je compte bien réussir un jour !

Il commença à couper la viande dans son assiette et s'arrêta de nouveau.

Kafei : ... vous savez, en tant que médecin je suis tenu par le serment d'Hippocrate de ne pas soigner les maux qui ne soient pas "physiques". Mais si vous avez des problèmes... je peux essayer de faire quelques chose pour... ?

Cléo : Mon soucis est impossible à soigner.

Dit la jeune reine d'un ton coupant. Elle prit son couteau, le fit danser dans sa main et trancha sa viende, qu'elle mangea avec ses légumes de façon très distinguée, assise bien droite dans son lit. Elle repensa aux paroles de Kafei. "Apprenti médecin". Qu'avait dit Hache tout à l'heure ? N'avait-elle pas parlé d'Ange, après avoir touché l'arme de Kafei ? Il avaient ces anneaux comme moyen d'attaque. C'était au moins aussi étrange que sa Lunarm, non ? Elle commença à se poser des questions. Et si ce garçon était un Ange ? Que ferait-elle, sachant que son plus grand souhait était de les voir tous mourir. Les Anges n'étaient-ils pas, comme dans les livres, sensé veiller sur eux ? Les soigner ? Eux, les humains ? Et pourtant, Suhaj, qui n'avait rien demandé avait subit une attaque, et cet attentat monstrueux contre la ville d'or avait tué ses parents !

Kafei : Selon votre philosophie, il faudrait dans votre cas mourir.

Kafei est toujours triste quand quelqu'un meurt, et ça s'est ressenti dans sa voix.

Kafei : Tandis que moi, je cherche toujours à soigner comme je peux. Dire que ce qu'on a ne peut être soigner, c'est comme verser du sel sur une plaie ouverte. On ne fait rien d'autre qu'empirer la situation.

Il s'interrompt, remarquant qu'après tout, il ne la connaissait que depuis aujourd'hui. C'est normal qu'elle n'allait pas révéler à un étranger quelque chose que tout le monde autour d'elle semblait ne pas comprendre. L'Ange haussa les épaules.

Kafei : Enfin, ce sont vos affaires, peut être bien que je ne suis pas celui qu'il vous faut. Délicieux le repas de ce soir, merci encore.

Cléo : Vous avez déjà tenté de soigner un patient qui était déjà mort ? Non, j'imagine, ça serait stupide. Moi, c'est la même chose, alors, n'essayez pas.

Elle termina son plat de résistance, tamponna ses lèvres avec sa serviette, passa sa langue sur ces dernières en voyant le jolis fraisier miniature qui se trouvait au coin de son plateau, et le prit dans ses mains.

Cléo : Mes servantes sont des bonnes à rien, mais ces pâtisseries viennent de la meilleure confiserie de Suhaj. Et même, je pense sans me vanter que c'est la meilleure de tout Pacifis...

Sweeties, pour Cléo, c'était un peu comme la Tour Eifflel pour les français.

Kafei termina à son tour son assiette avant de s'attaquer au dessert. Lorsqu'il prit une bouchée, il eut un large sourire sur ses lèvres.

Kafei : Je suis loin d'avoir goûté tout ce qui existe sur Pacifis, mais je sais reconnaître quand quelque chose est bon.

Il prit le temps de savourer à chaque fois qu'il en mangeait.

Cléo : Si vous souhaiter visiter le magasin, il se situe presque en dehors de la ville.

Comme une petite fille, elle lécha sa petite cuillière lentement, de chaque côté, pour ne pas en perdre une seule miette, et, puisque personne d'important n'était présent, elle prit la petite assiette de porcelaine où il restait un peu de crème et fit également disparaitre les preuves de l'existance du gâteau. Elle essuya sa bouche toujours de façon très polie, et le bout de son nez, par le même occasion. Elle irait bientôt rendre visite au pâtissier, pour une nouvelle commande.

Kafei posa son plateau sur la table juste à côté de lui et s'enfonça dans ses couvertures, sans rien dire. Il repensa à la fois où il avait pleuré dans les montagnes quand il croyait qu'il allait mourir bientôt. Il n'était pas aussi loin du compte. Une idée vint dans sa tête.

Kafei : Si on arrivait à connaître l'avenir, on pourrait éviter des drames comme ça. Vous connaissez un autre moyen que les charlatans dehors qui disent savoir lire dans les lignes de la main ou les marcs de café ?

Cléo : Mmh... Oui, peut-être, mais je ne sais pas si c'est vraiment fiable. Pour moi, l'histoire, ce n'est pas quelque chose de figée. Ca bouge toujours.

Elle se leva pour poser son plateau près de celui de Kafei, ranger les couverts dans les assiettes, empilées l'une sur l'autre.

Cléo : Vous n'avez pas bu, vous devriez prendre un verre d'eau.

Elle versa un verre et le posa sur la table de chevet de Kafei, qu'elle rapprocha du lit pour être à portée de main. Puis, elle retourna dans son lit, et s'y allongea, droite, les yeux rivés sur le plafond.

Cléo : Les histoires, on peut toujours les écrire. Nous sommes un peu chacun des personnages d'une grande histoire... Je n'aime pas me rendre compte que je ne vaux pas mieux que les autres, on dira que je suis quelqu'un d'extrêmement plus important ! Je voudrai vous dire, avant que vous ne dormiez... Si durant la nuit, vous sentez votre blessure vous faire mal, à la moindre petite gêne, réveillez-moi pour que je remette à jour la formule magique...

Kafei : On se souviendra sûrement de vous, vous avez une position importante. Et si ça peut vous rassurer, vous serez au moins importante pour moi. Vous avez accepté de me sauver alors qu'il n'y a plus d'hôpital en ville !

Kafei but une gorgée de l'eau apportée par Cléo, et reposa le verre sur la table de chevet. Il s'emmitoufla dans les draps.

Kafei : Merci pour tout encore Reine Cléo. Encore une fois, j'aimerai vous rendre service en retour. Si vous avez un problème, on ne sait jamais...